1. En France, la loi et rien que la loi.
En France, l’interdiction de vaper dans certains lieux fermés ouverts au public est encadrée par deux textes réglementaires : la loi et un décret d’application. Allons découvrir ces textes.
D’abord la loi :
« Il est interdit de vapoter dans :
- les établissements scolaires et les établissements destinés à l’accueil, à la formation et à l’hébergement des mineurs ;
- les moyens de transport collectif fermés ;
- les lieux de travail fermés et couverts à usage collectif.
Un décret en conseil d’Etat fixe les conditions d’application du présent texte. »
Damned, il nous faut aussi décortiquer ce décret qui, paraît-il, explicite mieux. Je vous fais grâce des articles sur les amendes encourues en cas de non-respect de ces règles, mais elles existent, ainsi que d'autres tournures totalement ésotériques qui passionnent tant les juristes pour aller au sujet qui nous intéresse :
« Les lieux de travail soumis à l’interdiction de vapoter en application du 3° de l’article L-3513-6 du présent code s’entendent des locaux recevant des postes de travail situés ou non dans des bâtiments de l’établissement, fermés et couverts, et affectés à un usage collectif, à l’exception des locaux qui accueillent du public.
Dans les lieux mentionnés aux 1° et 2° et dans les lieux mentionnés au 3° de l’article L.3513-6, une signalisation apparente rappelle le principe de l’interdiction de vapoter et, le cas échéant, ses conditions d’application dans l’enceinte de ces lieux. »
Récapitulons tranquillement, il est interdit de vaper :
- dans tous les lieux qui accueillent des mineurs, qu’ils soient fermés ou ouverts (salle de classe, réfectoire ou cour de récréation) ;
- les moyens de transports collectifs fermés (trains, avions, bus, bateaux, etc.) ;
- les lieux de travail d’une entreprise qui accueillent des postes de travail et qui sont à usage collectif.
La loi et le décret n’interdisent donc pas de vaper :
- sur les quais de gare, dans les aéroports, etc ;
- dans les moyens de transport ouverts (bus impérial, ferry, etc.) ;
- dans les bars, les restaurants, les cinémas, et tous les lieux de loisirs et de détente ;
- dans les bureaux des entreprises si l’on est seul dans un bureau ;
- dans les lieux des entreprises qui n’accueillent pas de postes de travail (couloirs, réfectoires, accueil, etc.) ;
- dans les salles d’accueil d’entreprise ou d’organisme dans lequel on se rend en tant que client/utilisateur/usager, comme une salle d’attente d’hôpital par exemple.
Ainsi la loi autorise bien plus de libertés aux vapoteurs qu’aux fumeurs. L’objectif du législateur était de montrer que la vape était moins dangereuse que le tabac, qu’aucun effet néfaste pour la santé lié à un quelconque vapotage passif n’a été décelé, il n’y a donc pas de raison d’interdire la vape partout où le tabac est interdit.
Aussi, affirmer que la loi interdit de vaper là partout où il est interdit de fumer est faux. Comme cet article par exemple.
2. De l'esprit de la loi à la réalité.
Dans les faits, les choses sont moins évidentes.
Dans les entreprises, un règlement intérieur peut être édicté qui prévoit une interdiction plus large du vapotage. Rappelons que ce règlement intérieur doit être discuté avec les représentants du personnel et validé par l’inspection du travail. Il ne doit pas être imposé sans concertation. Là encore si une entreprise décide d'interdire, elle ne peut pas le faire en prétextant que c'est la loi. Elle le fait parce qu'elle a envie.
De plus, interdire quelque chose qui est autorisé par la loi, c'est priver d'une liberté individuelle. Pour cela, il faut que plusieurs conditions soient réunies, notamment :
- une interdiction proportionnée ;
- un but recherché.
Aussi interdire strictement l'usage de la vape et sans raison ne répond pas à cette obligation. Ainsi, un salarié qui se verrait avertir, voir licencié, pour avoir utilisé son e-cig dans un lieu de travail autorisé par la loi, et sans que l'employeur ne puisse en justifier son interdiction, pourrait contester la sanction.
Dans un lieu ouvert au public mais tenu par un professionnel, comme un bar, un restaurant, ce dernier est libre d’appliquer la politique qu’il souhaite. Cependant, cette interdiction doit être clairement affichée et bien différenciée de l’interdiction de fumer. Lorsqu’aucune interdiction n’est affichée, il conviendra donc de demander l’autorisation et/ou de rester discret. Si vous perturbez les autres clients/usagers en « envapotant » la pièce, ne vous étonnez pas que cela se passe mal.
Enfin, la SNCF a considéré que les quais des gares étaient un transport collectif. Si, si, vous avez bien lu (un exemple de cette étonnante décision : ici). Cette position est une interprétation de la loi qui est bien entendu discutable. Vous pouvez rester sur le quai d’une gare autant de temps que vous voulez, vous n’arriverez jamais à destination. :D C’est une évidence pour tout le monde mais un quai n’est pas un moyen de transport.
De plus, la loi parle de moyens de transports fermés, ce qui n’est évidemment pas le cas de beaucoup de quais de gare.
On peut même dire qu’on n’est même plus dans l’interprétation mais dans le détournement de la loi. Cette interprétation de la SNCF peut donc être contestée si vous prenez une amende. Cependant, personne ne peut vous garantir que vous gagnerez un combat judiciaire. Les chances sont grandes de gagner, puisque le juge ne s’appuiera que sur la loi et le décret. Des cas de contestation d’amendes notamment dans les gares ou sur les quais semblent déjà avoir eu lieu en faveur des vapoteurs (à lire ici). Et ces cas pourraient faire jurisprudence mais rien n'est certain non plus. Si vous souhaitez vous y engager, rapprochez-vous d’un avocat ou de l’AIDUCE dont une des missions est l’aide aux vapoteurs.
Cette traduction alambiquée de la SNCF est en tout cas édifiante. Elle est le signe soit d’une incompréhension ou d’une erreur d’interprétation ou bien encore d’une volonté manifeste de détourner la loi qui devient alors une vérité pour tout citoyen ne prenant pas la peine de se renseigner par lui-même.
3. L'exemple de la Belgique.
Dans d’autres pays, c’est beaucoup plus simple. Bien souvent, cela n'a rien à voir avec la complexité de la situation typiquement française. En Belgique, par exemple, il est interdit de vaper dans tous les lieux publics fermés ou tous les lieux fermés accueillant du public, comme le tabac (cet article). Ainsi, les anciens fumeurs ne seront certes pas dépaysés. Mais le pendant est que la vape est traitée comme le tabac, diffusant ainsi l'idée que c'est blanc bonnet et bonnet blanc.
Pour aller plus lien, tous les textes juridiques au niveau européen et aussi français sont disponibles sur ce fil de discussion lancé par Leio.
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